Défilés à Milan: les adieux détonnants de Tom Ford à l'homme Gucci

MILAN (Italie), 15 jan (AFP) - Le gourou stylistique de Gucci, Tom Ford, a entamé sa tournée d'adieu par Milan, signant une dernière collection hommes éblouissante pour la marque aux deux "G", dans le cadre des collections masculines 2004/2005 qui prenaient fin jeudi.

Le sémillant Texan, qui quitte en avril son poste de grand-chef styliste de chez Gucci, conclura sa "tournée" en mars à Paris par une dernière collection femmes d'Yves Saint Laurent, marque phare du même groupe.

Dès mercredi soir, Tom Ford a engagé "son au-revoir" face à "son" public milanais. Les spectateurs --journalistes et acheteurs-- attendaient une surprise. Elle est arrivée par le biais de danseurs et danseuses à moitié nus gesticulant sur la scène, alors que les mannequins, impassibles, défilaient.

Le genre boîte de nuit --avec la musique à fond-- était en fort contraste avec le style très propre, chic, séduisant en diable du dernier cru Ford. Superbes manteaux blancs à martingale, gabardines hautes avec velours noir au col. L'impression donnée est celle d'une mode somptueuse pour séduire, où notes parisiennes et accents américains alternent.

Longue acclamation au final en direction du créateur. Qui le remplacera? La question était sur toutes les lèvres. Le plus important n'est-il pas de savoir qui il va remplacer?

C'est au "prince" du made in Italy, Giorgio Armani (1,3 milliard d'euros de chiffres d'affaires annuel) qu'il est revenu de clore le bal des défilés jeudi après-midi, avec une profusion de gris en tricots, vestes moulantes et bonnets mode.

Avant cela, la paire Domenico Dolce et Stefano Gabbana avait proposé une ambiance Dolce Vita, avec fontaine de Trevi en décor, pour son défilé. Couple Marcello Mastroianni/Anita Ekberg en vedette. Année 1960.

Mais les gabardines de cuir vert, à cols de fourrure discrets et les mailles avec fourrure cousue sur le plastron n'ont rien de l'époque du jeune Marcello et sont parfaitement contemporaines.

Le style reste très italien, avec des clins d'oeil appuyés pour rappeler les habitudes, les outrances du sud de la péninsule. C'est devenu la marque de fabrique de la maison.

Chez Vivienne Westwood, le tempo du défilé ne pouvait être qu'anglais, plus précisément londonien. Une photo géante de Piccadilly Circus dominait la scène, montée à l'envers.

En fin de présentation, l'adolescente Vivienne, 62 ans au compteur, engage une danse endiablée au son d'un bon vieux rock, sous les applaudissements et lazzis d'un public conquis par la spontanéité et la joie d'être de la styliste.

Le beauté de ce style-là réside sans doute dans le fait que le conformisme cotoie l'excentricité la plus absolue: dans le défilé, se suivent un costume rayé gris parfaitement classique et un paysan médiéval en justaucorps gris et simili haillons sur le poitrail.

Miuccia Prada a offert évidemment une collection plus urbaine, sobre, policée: pardessus gris sur tee-shirt noir. Le refus du conformisme se loge dans les détails: touche colorée sur un ensemble gris, un petit robot porté en pendentif ou bien le pli récalcitrant sur un col de chemise ou une veste, par ailleurs impeccable.

Chez Prada, le fond de commerce est comme toujours irréprochable: veste de cuir, luisante, courte et droite comme un pur manifeste stylistique, chemise noire aussi simple que la suite pour violoncelle de Bach qui passe sur la bande son du défilé.

Ailleurs, les observateurs soulignent le beau chic de Ralph Lauren et l'exubérance heureusement assagie de Roberto Cavalli.par Olivier THIBAULT